Vous souhaitez revoir des classiques ou découvrir des petits bijoux moins connus ?

On vous explique pourquoi il ne faut pas passer à côté des films d’Emir Kusturica.

Êtes-vous fan de cinéma inconditionnel ou amateur curieux ? Si oui, c’est l’occasion de vous parler d’un cinéaste hors norme qui vit…en Normandie ! Pour autant, il est originaire de Sarajevo en Bosnie et ses œuvres sont inspirés de son enfance dans l’ex-Yougoslavie, de ses rêves et des thèmes qui lui tiennent à cœur. Nous avons préparé une rétrospective de sa carrière et un classement de ses trois meilleurs films (absolument subjectif) à voir et à revoir sans limites. Suivez-nous !

Jeunesse et premières oeuvres

Né à Sarajevo en 1954, le jeune Emir grandit dans la République fédérative socialiste de Yougoslavie du Maréchal Tito.

Lycéen, il a de mauvaises fréquentations et ses parents l’envoient étudier à Prague dans la célèbre FAMU (Academy of Performing Arts). Il y excelle et est remarqué par ses professeurs. Rapidement, il réalise ses premiers courts métrages et films pour la télévision. Parfois censuré pour ses contenus audacieux et anticonformistes, il gagne le prix de la télévision yougoslave avec une adaptation d’une nouvelle du prix Nobel de littérature Ivo Andric. 

Une reconnaissance internationale

Kusturica fait son entrée sur la scène internationale avec son premier long métrage Te souviens-tu de Dolly Bell ? en 1980, pour lequel il obtient un Lion d’Or de la première œuvre à la Mostra de Venise et le prix de la critique du Festival du Film International de Sao Paulo. Dans ce film, il fait se confronter le rêve occidental d’adolescents vivant à Sarajevo sous Tito. Un film satirique, juste, poétique et presque documentaire du mode de vie traditionnel en Yougoslavie. Il est aussi en partie autobiographique. C’est ce qui fait la patte de Kusturica. Il s’inspire fortement de sa propre expérience pour ses films. Ses prochaines réalisations gardent cette marque de fabrique, en plus d’y ajouter une énergie folle et un rythme qui vous tient en haleine pendant toute la projection (ou streaming aujourd’hui).

La consécration arrive en 1985 avec son second film Papa est en voyage d’affaires puisqu’il remporte la Palme d’Or au Festival de Cannes. Il a seulement 31 ans. Cependant, il n’est pas présent à la cérémonie et crée une première polémique. Il explique qu’il devait « poser un parquet chez un ami ». Personnage piquant et imprévisible, c’est aussi ça Kusturica.

Cette réussite lui ouvre les portes du cinéma américain. Après le film Le Temps des Gitans, un thème qui intéresse fortement Kusturica, il part enseigner le cinéma à l’Université de Columbia, New York. Il va revenir derrière la caméra plus rapidement que prévu lorsqu’un de ses étudiants lui soumet un scénario qu’il juge excellent. Il abandonne l’enseignement pour mettre en scène ce scénario qui deviendra Arizona Dream. Le film est porté par des acteurs magnétiques comme Johnny Depp, Jerry Lewis ou Faye Dunaway et une bande-son marquante de Goran Bregovic. Il raconte l’histoire d’un jeune homme dont la vie va profondément changer à son arrivée en Arizona. Il se lie avec deux femmes qui lui apportent à la fois rêve, amour et danger.  Le film est un succès en 1993.

La guerre de Yougoslavie

Kusturica vit mal la guerre de Yougoslavie qu’il observe à la télévision internationale et lors d’ allers-retours pour aider sa famille, restée à Sarajevo.

Profondément blessé de la manière dont les médias occidentaux couvrent le conflit,  il décide de dépeindre sa vision dans le film Underground, en retraçant l’histoire depuis la seconde guerre mondiale jusqu’au conflit ethnique des années 90. C’est une fresque exubérante et satirique. Le film permet au réalisateur de remporter une seconde Palme d’Or. Cependant, des controverses viennent entacher la promotion du film. Kusturica est accusé d’avoir choisi le camp des nationalistes serbes, ce dont il se défend. 

Suite à cette déception, il arrête le cinéma et se consacre à la musique avec son groupe.

Pour notre plus grand plaisir, il revient finalement en 1998 avec la comédie Chat noir, chat blanc. A nouveau, il traite le thème des gitans dans un esprit plus léger qu’Underground, empli d’humour et avec une palette hautement colorée. On y parle de mariage, d’escroquerie et de rivalités familiales avec des personnages plus déjantés les uns que les autres.  

Plus récemment, il nous offre On the milky road où il joue aux côtés de Monica Bellucci. Les paysages, la bande son, l’univers semi-magique et durement réel à la fois créent une poésie dont on ne se lasse pas.  

Kusturica, le tourisme, la musique et quelques surprises

En 2004, il fait créer un village entier et une voie ferrée pour le tournage du film La vie est un miracle, en Serbie, proche de la frontière avec la Bosnie-Herzégovine. C’est un village traditionnel en bois qui devient un symbole de l’altermondialiste et un nouveau site touristique écologique. Baptisé Küstendorf, des séminaires sur le cinéma y sont organisés pour les jeunes et il est possible d’y dormir dans des habitations traditionnelles reconverties en hôtel. 

Kusturica a plusieurs facettes et l’une d’elle est la musique. Il fait partie de plusieurs groupes et tourne dans les Balkans et en France notamment. Son groupe No Smoking Orchestra assure également la musique de ses films depuis 1998. Plutôt impressionnant, non ? 

On peut ajouter que Kusturica a tourné un film sur Maradona, un clip vidéo pour Manu Chao (Rain’in in Paradize) et de nombreuses publicités, notamment pour des cigarettes. Aujourd’hui, ce type de publicité est interdite.  

Notre Top 3 spécial Kusturica

On vous l’a promis, voici notre top 3 des films de Kusturica :

1.On the Milky Road 

Résumé : On suit, ou plutôt on est happé par l’histoire d’amour impossible sur fond de guerre, décors bucoliques  et poésie, entre Kosta  (Emir Kusturica) et Nevesta (Monica Bellucci). L’un livre du lait aux soldats sur le front en frôlant les balles, l’autre est une réfugiée italienne tellement belle que les hommes se battent pour se l’approprier.  Le mélange romance et violence sont savamment dosés dans un rythme effréné et dans une ambiance burlesque.

Anecdote : Le film a été tourné en Bosnie-Herzégovine et a nécessité pas moins de 4 ans de tournage.

 

2.Underground

Résumé : En 1941, des communistes serbes trouvent refuge dans une cave pour échapper aux ennemis allemands. Deux amis, Blaky et Marko y tombent amoureux d’une actrice pragmatique qui finit par séduire un officier allemand. Les occupants de la cave sont coupés du monde et manipulés par Marko qui est le seul à aller et venir depuis l’extérieur, devenant un proche conseiller de Tito. Il se garde de les informer de ce qui se passe réellement dans le monde extérieur, alors que la vie est redevenue plus ou moins normale.

Anecdote : le film polémique est accusé d’être pro-serbe, malgré une Palme d’or au Festival de Cannes

 

3.Chat noir, chat blanc

Résumé : Les bords du Danube sont le théâtre d’importants trafics entre russes, allemands et gitans. Marko et son fils n’y échappent pas et se voient contraints d’accepter un mariage peu avantageux après un détournement de train raté. L’histoire s’est comme arrêtée dans ces communautés décrites par Kusturica en mélangeant mystique, bazar étudié, énormément d’animaux et des personnalités hautes en couleurs. 

Anecdote : après Underground, Kusturica revient avec une comédie visuellement bordélique et optimiste. Il fait ainsi oublier quelque peu les polémiques. 

Bonne séance des films de Kusturica, et comme toujours, retrouvez nos idées de séjours en Croatie, Slovénie et au Monténégro ici.